MAP historique et description
MAP...
Le nom MAP vient de l’initiale du nom de famille des trois participants à ce projet:
Alain Maury, Georges Attard et Daniel Parrott.
C'est un projet visant à détecter des petits corps du système solaire dans le ciel austral en utilisant des télescopes à grand champ, des caméras CMOS et un logiciel détectant les objets se déplaçant en utilisant la technique du suivi synthétique, écrit par Daniel Parrott, tycho-tracker
Les objectifs scientifiques sont multiples :
- Découvrir de nouveaux astéroïdes géocroiseurs et autres astéroïdes à inclinaison élevée
- Découvrir (éventuellement) de nouvelles comètes
- Découvrir (éventuellement) de nouveaux astéroïdes et comètes d'origine interstellaire
Alain Maury a financé l'instrumentation actuelle et écrit le script d'acquisition (dans le cadre du logiciel prism), Daniel Parrott a écrit le logiciel Tycho-tracker, et l'a amélioré en collaboration avec nous pour le rendre compatible à une utilisation automatisée, et Georges Attard a écrit les scripts et programmes qui permettent le traitement automatique des images au fur et à mesure de leur arrivée sur le PC de traitement, et faciliter l'extraction et le suivi des objets découverts. Alain Maury peut être considéré comme professionnel (membre de l’UAI ayant travaillé auparavant dans des observatoires professionnels) mais agit comme amateur, n’étant relié à, ni financé par aucune institution professionnelle, Georges Attard et Daniel Parrott sont astronomes amateurs, mais leur domaine professionnel est l’informatique.
Historique :
Alain Maury est astronome amateur de passion, et photographe de formation (Ecole Nationale de la Photographie et du Cinéma). Autodidacte, il est membre de l’Union Astronomique Internationale, au départ en France et aujourd’hui au Chili où il réside depuis l'an 2000. Il a découvert son premier astéroïde géocroiseur en 1983 sur des plaques photographiques prises avec le télescope de Schmidt de l’observatoire de la côte d’azur en France.
Il a découvert plusieurs autres astéroïdes géocroiseurs et 2 comètes entre 1985 et 1988 alors qu’il travaillait à l’observatoire du Mont Palomar en Californie dans le cadre de la seconde survey de Palomar. De retour en France, il a essentiellement travaillé à la mise en fonctionnement correcte du télescope de Schmidt de l’OCA, puis en son équipement d’une caméra CCD permettant la détection automatique des astéroïdes. Le télescope mesurait 90cm de diamètre, et la caméra était à l’époque de sa construction la plus grosse caméra CCD en Europe, avec 4 mégapixels. A la pointe de la technologie de l’époque, elle était utilisée via un PC pentium, avec 32 Mo de mémoire, et une énorme station de travail HP qui avait 64Mo de RAM (le bon vieux temps). Dans le cadre du programme ODAS, une collaboration avec l'agence spatiale allemande (DLR), en deux ans et demie 5 astéroïdes géocroiseurs et une comète furent découverts. Dans la mesure où certains astronomes pensent que l'astronomie moderne ne se fait que via des modèles et des simulations et qu'il est inutile d'obtenir des données réelles (sarcasme), le télescope a été fermé par décision du directeur de l’observatoire aidé de son directeur adjoint.
Alain Maury a changé de continent et a ensuite travaillé à l’observatoire européen austral dans le cadre des programmes DeNIS, puis du programme EROS2. Ensuite il a quitté le CNRS pour monter un observatoire public dans le désert d’Atacama, dans le but de faire découvrir le ciel austral au public, mais en arrière-pensée avec l’idée de recherche à nouveau des astéroïdes.
En 2015, il a conduit un programme de recherche automatisé en collaboration avec Joaquin Fabrega du Panama, à l’aide d’un télescope newton de 40cm (ASA) et d’une caméra de 16 mégapixels FLI PL16803. Ce programme a été conduit durant un an et n’a donné aucune découverte intéressante. Ce programme a détecté beaucoup d’objets intéressants, mais la magnitude limite n’étant pas suffisante, ces objets étaient déjà découverts dans les semaines précédentes par des télescopes plus puissants. Il a permis d'écrire un script d'automatisation complète des observations qui a servi de base au script actuel d'observation.
En 2014 la firme américaine Celestron a commercialisé des télescopes à grand champ, les RASA (Rowe Ackerman Schmidt Astrograph) ayant 28cm de diamètre, mais seulement 62cm de distance focale, donnant un très grand champ de 3.3x3.3° avec une caméra ML16803. Un premier télescope a été acheté, monté sur une monture Paramount ME, et il était possible de couvrir une grande surface de ciel en très peu de temps.
Premier prototype, RASA 11, caméra CCD ML16803 sur monture Paramount ME
Depuis 3 autres télescopes de ce type ont été acheté. En 2019 la firme chinoise ZWO a commencé à commercialiser des caméras grand format (24x36mm) avec des détecteurs de marque Sony IMX455 de 60 mégapixels, de très haute sensibilité, très faible bruit, temps de lecture quasi instantané, et il a semblé évident que l’on gagnerait beaucoup en utilisant ces caméras au foyer des télescopes RASA.
2019 : 4 RASA, 2 caméras
Une monture solide a été aussi achetée (VMA200 du constructeur français Valmeca) permettant de supporter les 4 télescopes. Cette monture de type allemande a le grand avantage de ne pas nécessiter de retournement au méridien, et elle supporte sans problème les 4 télescopes. Elle est utilisée avec une électronique MCMT32 via son driver ascom. Le tout est monté dans une coupole de type clamshell. Un système de montage a été réalisé au Chili permettant de décaler correctement les 4 télescopes de façon à couvrir des champs contigus. Il a fallu également réaliser des adaptateurs permettant de monter les caméras sans produire de vignettage. Dernier ajout, pour gagner du temps et passer moins de temps à focaliser pour compenser la dilatation du tube aluminium original du télescope, 4 tubes en fibre de carbone.
Avec les 4 télescopes, une image représente alors 240 mégapixels, donc à la hauteur des plus grandes caméras utilisées sur les télescopes professionnels, avec une qualité cosmétique identique sinon meilleure (pas d’interstices entre les différents champs, pas de colonnes mortes). La caméra Megacam du CFHT à Hawaii fait 288 mégapixels, la caméra OmegaCAM du VST de l’ESO fait 250 mégapixels.
Au niveau logiciel, il semblait évident que la technique ancestrale (datant de 1989, projet Spacewatch) consistant à photographier le même champ plusieurs fois avec un intervalle de temps donné n’était plus forcément la méthode idéale, on devait, 30 ans plus tard, avoir progressé un peu et utiliser des logiciels un peu plus intelligents. Alain Maury en 2018 est rentré en contact avec Michael Shao du JPL (NASA) qui avait, avec son équipe, développé le premier logiciel utilisant le suivi synthétique. L’idée consiste à faire une série de poses courtes, puis de les décaler en suivant le déplacement de l’astéroïde que l’on veut détecter. Le problème étant que lorsque l’on cherche à détecter de nouveaux astéroïdes on ne connait ni la vitesse ni la direction de l’astéroïde. Dans ce cas, la méthode brutale consiste à faire toutes les additions possibles dans toutes les directions possibles et voir si on détecte un éventuel astéroïde. Ceci est aujourd’hui faisable grâce aux cartes GPU (Graphics Processing Unit) qui augmentent de plusieurs ordres de magnitude la puissance de calcul d’un PC. Alain Maury ayant laissé un commentaire sur les télescopes RASA sur une vidéo youtube, il fut contacté par Daniel Parrott pour lui dire qu’il développait justement un logiciel de suivi synthétique, et les deux ont commencé à travailler ensemble, rapidement rejoint par Georges Attard qui est membre comme Alain Maury du Groupement d’Astronomie Populaire de la Région d’Antibes (GAPRA), le meilleur club d'astronomie en France :) Jean Marc Mari, ami de longue date de Alain Maury rejoint périodiquement l'équipe pour les observations.
Au départ, pas du tout utilisable en mode automatique, tycho tracker a été progressivement modifié pour pouvoir être scriptable, et a subi de nombreuses améliorations, dont l’utilisation du catalogue astrométrique GAIA (version GRAPPA réalisée par Marc Serrau un astronome amateur français) d’une dll (dynamically linked library) aimablement fournie par Raoul Behrend (observatoire de Genève) permettant le calcul de la position précise des astéroïdes déjà connus. Georges a ensuite écrit un panneau de contrôle qui permet la gestion des détections faites durant la nuit et nous avons mis en place une procédure de confirmation des objets intéressants détectés à l'aide d'un télescope Newton de 40cm (ASA sur monture Nova 120) qui sera à terme remplacé par un télescope de 50cm à F/4 dont la construction est quasiment terminée mi-2021.
L'instrumentation :
2 RASA sur la monture VMA
Les mêmes la nuit... Les deux derniers RASA seront installés en lieu et place des contrepoids actuels.
La pandémie a fait que le financement de l'opération est devenu nettement plus difficile. Pour l'instant, nous avons les 4 télescopes RASA, la monture VMA, 4 caméras zwo 6200 (mais une est utilisée sur le télescope de suivi, donc au mieux nous pourrons mettre 3 RASA en fonctionnement), les 5 PCs d'acquisition de données, et seulement 2 PC de traitement d'image. Ces PC sont des i9 équipés de 64Go de mémoire vive, 500Go de disque dur SSD nvme, et un disque de backup amovible de 4 To. A terme, le tout devrait ressembler à ça :
Les PC NUC (Next Unit of Computing) sont des PC très compact (115x115x50mm). Dans notre cas ce sont des i7 avec 16 Go de mémoire vive et 512 Go de disque dur rapide (nVME). (Le PC NUC1 est le maître du jeu. Son script décide des champs à photographier, il contrôle sa caméra, mais aussi la monture et le moteur de mise au point du télescope. Il envoie différents ordres aux différents PC NUC qui ne contrôlent eux que leur caméra et le moteur de mise au point du télescope et envoie les images prises sur leur PC GPU respectifs. Actuellement nous utilisons un mode où nous prenons 36 images de 30 secondes, et une fois cette séquence réalisée, chaque PC NUC envoie un fichier de synchronisation sur son PC GPU. Le script faisant tourner tycho scanne ce directory, et dès que des observations sont complétées, et que le fichier de synchronisation apparaît dans le dossier de synchronisation, il lance tycho sur le jeu d'images. Tycho génère des observations sur chaque PC GPU qui sont envoyées sur le PC GPU1 qui est le PC que voit l'observateur. En théorie, les observations sont réalisables en mode automatique, mais la présence d'un observateur est encore souhaitable pour décider des actions de suivi lorsqu'un astéroïde intéressant est détecté. Dans la pratique Alain Maury réalise les observations de début de nuit et à partir de 1h du matin, Georges Attard se joint à lui. L'observateur décide si un astéroïde nécessite une confirmation, auquel cas il presse sur le bouton "to confirm", qui génère un fichier texte contenant les 3 lignes de données astrométriques, qui est placé dans un directory que le PC NUC5 scanne toutes les minutes pour voir s'il y a un champ à faire. Lorsque ce fichier existe, le NUC5 se charge des observations qui ont traitées par le PC GPU5. Comme nous connaissons la vitesse et la direction de l'astéroïde que nous cherchons à confirmer, ces paramètres sont donnés à Tycho, et le calcul se fait autour de ces valeurs, ce qui augmente beaucoup la vitesse de traitement, ce qui fait que ce PC peut être équipé d'une carte GPU plus lente que ceux des autres PCGPU. Dans certains cas l'objet recherché est évident, d'autres fois lorsque l'objet est faible, tycho peut détecter de nombreux objets très près du niveau de bruit de l'image. Dans ce cas, Georges a écrit une procédure de vérification qui prends les candidats trouvés par le télescope de confirmation et tente de faire passer une orbite dans ces 6 points, ce qui permet d'identifier à coup sûr l'objet recherché. Dans certains cas, l'objet recherché, très faible n'était pas réel, auquel cas rien n'est détecté sur le PC de confirmation, ce qui prouve que l'objet détecté n'existait pas. Dans le panneau de contrôle écrit par Georges Attard, il y a également un bouton "NEOCP" qui permet d'envoyer vers le télescope de confirmation une observation d'un des objets présents actuellement sur la NEOCP. Etant dans l'hémisphère sud il n'y a pas beaucoup d'observateurs capables de suivre un objet à des latitudes très australes, et donc nous devons aussi réaliser le suivi de nos découvertes, et c'est à l'observateur de décider quels objets suivre. Le travail de l'observateur est de juger la "réalité" des détections faites par tycho, de lancer les confirmations à effectuer et de lancer les observations de suivi des astéroïdes découverts les jours précédents.
Actuellement nous réalisons 36 poses de 30 secondes sur chaque champ. En posant moins on ne détecte pas les objets lents. Tycho réalise 2000 vecteurs pour chaque champ, donc 2000 additions différentes (avec un décalage en position et en angle différent). En été, nous réalisons une vingtaine de champs dans la nuit, une fois le système mieux réglé (focalisation automatique) et en hiver on devrait pouvoir faire 30 champs dans la nuit. Chaque image fait 60 megapixels, soit 120 Mo. La pile de 36 pose représente donc 4.1 Go pour les images en binning 1x1 et 1Go pour les images binnées en 2x2. Les 2 caméras génèrent donc 160 Go d'images brutes, plus 160 Go d'images prétraitées alignées sur le PC GPU, plus 40 Go pour les images binnées en 2x2. Pour l'instant donc on génère 360 Go d'images dans la nuit, et générera dans les 500 lors des nuits d'hiver. Avec les 4 caméras nous serons au To d'images chaque nuit. 300 nuits dans l'année 300 To.
Au niveau des calculs, nous réalisons 2000 vecteurs par pile d'image, soit 108 10^12 additions sur les images (binning 1x1 et 2x2), soit 108 tera opérations par nuit et par caméra. Ce qui serait complètement impossible à faire avec un ordinateur personnel normal.
Les observations :
Les logiciels d'acquisition tournent avec le logiciel prism. Il y a un script sur le PC maître et des scripts esclaves sur les autres PC NUC ne contrôlant que leurs caméras et focuser (et un télescope virtuel, non existant). Une fois lancé, le script maître calcule la hauteur du soleil. A -5° d'altitude, il ouvre la coupole, et refroidit la caméra. Nous travaillons à seulement -10°, la caméra zwo ne permettant pas de descendre beaucoup plus bas de manière stable en été (30° de delta T est déjà beaucoup). Une fois le soleil à -12° d'altitude, les observations commencent automatiquement.
Nous utilisons un fichier texte des champs faisables dans le ciel, de 0° de déclinaison à -90°, par bandes de 2.1° de haut avec une seule caméra, 4.1° avec deux ou quatre caméras, et chaque bande est divisée en 3.2/cos(déclinaison) champs. Au cours du temps nous allons donc toujours repasser sur les mêmes champs. Au départ (disons juste après la pleine lune), le fichier est rempli de 0, un 0 par champ, séparé par un espace du champ suivant. Lorsqu'un champ a été déjà observé durant la lunaison, le 0 est remplacé par le numéro du jour où le champ a été pris. Ce qui fait que le lendemain un champ déjà observé est ignoré. Nous n'observons actuellement qu'entre -2h et +2h du méridien. Et donc le télescope passe d'un champ au suivant, tant qu'ils n'ont pas été faits. S'il rencontre un champ déjà fait, il passe à la bande de déclinaison inférieure. S’il arrive à 2h après le méridien, il passe aussi à la bande de déclinaison inférieure.
Avec une seule caméra (champ de 3.3x2.2°, pixel de 1.2") il y a 3087 champs faisable dans l'hémisphère austral, sur 42 bandes de déclinaisons différentes (dont les centres de champ commencent par -1.05°, -3.15°, -5.25°, etc....). Il y a 113 champs sur la première zone de déclinaison (à 0° : 360/3.2=113 champs) et seulement 6 champs sur la zone à -87.15°
Le fichier texte original, pour une seule caméra, lorsqu'il est vide
Le fichier texte, après plusieurs nuits d'observations (en Janvier Février 2021)
Le fichier correspondant à 2 caméras superposées
Et dans le futur, une fois les 4 caméras fonctionnelles, le fichier ressemblera à ça : 4 fois moins de champs, ou 4 fois plus de ciel couvert dans le même intervalle de temps :) Le ciel austral entier (déclinaison négative) ne représente que 803 images.
Le logiciel remplit automatiquement durant la nuit un fichier de couverture du ciel (sky coverage) qui est envoyé automatiquement en fin de nuit au MPC et qui permet de connaître le ciel qui a été couvert en un temps donné. En fin de nuit, les scripts zippent les images brutes et les stocke sur un disque dur annexe de 4To que l'on change régulièrement.
Depuis j'ai rajouté une procédure pour éviter les champs dans la voie lactée. Lorsque le nombre d'étoiles dans le champ est trop grand, il y a beaucoup de fausses détections. Donc depuis peu nous évitons d'aller dans la voie lactée. Pour chaque champ un programme a regardé le nombre d'étoiles du catalogue UCAC il y avait dans le champ, s'il était au dessus d'une certaine valeur, à la place d'écrire un 0 il écrit un W (comme dans milky Way). Ce qui donne ce genre de fichier pour 3 caméras superposées :
Tous les champs à déclinaison inférieure à -30° sont nos observations sur la période considérée, ce diagramme ne comporte que les observations qui vont plus loin que magnitude 20.
Les champs observés durant le mois d'Avril (du 5 au 27) avec 2 caméras :
Le logiciel permet la détection des astéroïdes et reconnaît les astéroïdes déjà connus (présents dans le fichier mpcorb.dat), et permet de classer ces astéroïdes en fonction du niveau de confiance que l'on peut accorder à la détection. A cause du grand champ offert par la caméra, en utilisant (pour l'instant) 36 poses de 30 secondes (soit un total de 18 minutes) nous pouvons détecter des sources de magnitude 20.5 avec une relative confiance.
Durant une exposition, la pose précédente est sauvegardée sur le PC local (NUC), puis prétraitée (dark, flat) recentrée par rapport à la première image de la sériel, envoyée vers le PC de traitement, puis binnée par un facteur 2 et envoyé également sur le PC de traitement qui est équipé d'une ou deux cartes graphiques nVidia RTX2080ti. Le traitement se fait en temps réel (c'est à dire tel que le traitement d'une pile d'image est fait en un temps au moins inférieur au temps de prise de vue de la pose suivante). En début de série, le programme d'acquisition exécute un recentrage astrométrique, et une focalisation. Nous réalisons un dithering dans une fenêtre de 20 pixels entre chaque pose, histoire de ne pas avoir des points chauds résiduels allongés. Le télescope n'est pas autoguidé, vu la faible durée des poses individuelles. Le programme maître (celui qui contrôle aussi la monture) envoie des informations aux autres PC d'acquisition et il y a un protocole permettant de synchroniser tout ce petit monde, par échange de fichiers dans des directory communs. Le programme des PC esclaves ne fonctionne qu'en lisant les fichiers contenant les observations à faire (coordonnées, de façon à remplir l'entête du fichier correctement, temps de pose, nombre de poses, etc…) et une fois le télescope recentré astrométriquement, il envoie juste un fichier vide "go.txt" qui fait que le PC esclave lance ses acquisitions. Une fois terminé, ce sont les PC esclaves qui envoient un fichier "endpose.txt" dans un autre directory qui indique à celui-ci qu'il peut déplacer le télescope sur le champ suivant. La synchronisation entre PC en utilisant ce protocole d'échange de fichier textes est au pire de 1.5 secondes de temps, mais bien souvent moins, de l'ordre de quelques dixièmes de seconde, donc on ne perd que peu de temps durant la nuit. Une fois une série d'observation terminée (typiquement 36 poses de 30 secondes) il écrit un fichier dans le directory "sync" du PC de traitement.
Tycho tracker et le panel de contrôle :
Nous utilisons la dernière version de tycho-tracker, et Georges a écrit des scripts qui permettent de lancer automatiquement tycho-tracker avec différentes options et qui surveillent le contenu du directory de synchronisation (sync). Lorsqu'une série d'images est terminée, le script utilisé cette nuit là peut commencer le traitement avec tycho.
Etant donné qu’avec le tracking synthétique on peut ajuster la recherche au type d’objet que l’on cherche à détecter, sachant également que si on veut réellement explorer toutes les vitesses et tous les angles de recherche, le temps de calcul croît exponentiellement, nous réalisons deux détections, une sur l’image en bin1 pour les objets lents (jusqu’à 1.2’’/min) et une sur les images en bin2 pour les objets rapides (jusqu’à 20’’/min). Dans ces conditions nous arrivons à maintenir une cadence temps réel.
Un des problèmes auxquels nous avons été confronté est que pendant que Tycho travaille sur les images nous ne pouvons pas l'utiliser pour vérifier les observations, choisir les objets intéressants dont il faut envoyer les mesures au MPC, etc... Pour celà, Georges a également écrit une application « tableau de bord » qui permet d’analyser les images obtenues pendant que Tycho continue à travailler en arrière plan.
Vue du panneau de contrôle : Le premier bouton (draw) permet de dessiner une carte du ciel, montrant l'équateur céleste, le plan de l'écliptique, le plan galactique et l'ascension droite du point à l'opposition (la ligne pointillée bleu verticale à la droite du dessin). On voit aussi les champs réalisés dans la nuit (les petits rectangles verts). Le bouton backup en fin de nuit comprime les images et les stocke sur le disque dur de backup. Load fields permet de charger les champs déjà réduits par tycho, et il donne le nombre d'objets connus sur les images, d'un côté les astéroïdes identifiés comme connus et de l'autre les inconnus. Les boutons suivants permettent de lancer différents scripts si l'on souhaite repasser certains champs (ou tous les champs) dans tycho. Plus bas on peut choisir à gauche soit tous les objets, soit les connus, soit les inconnus, et à droite leur facteur de confiance, qui peut être haut, moyen ou bas (high medium ou low). Il est très rare qu'un objet classifié en basse confiance soit réel. Par contre on peut voir des fausses détections dans les deux autres catégories (haute et moyenne) notamment dans les champs très encombrés où l'image de l'astéroïde potentiel est noyé dans une étoile brillante. La partie inférieure droite de la fenêtre (avec MPC) permet de passer en revue tous les objets connus, et de les sélectionner pour envoi au MPC. Dans certains cas, notamment quand l'image de l'astéroïde est contaminé par une étoile, il vaut mieux ne pas retenir l'objet. Une fois terminé, on presse sur le bouton MPC et le programme génère automatiquement le nom des objets retenus et le message à envoyer au MPC.
Dans le cas présent, on a choisit de regarder tous les objets "de haute confiance", cette nuit là, il n'y en avait qu'un seul, et il qui correspond à la découverte de 13D1D01, qui est devenu plus tard 2021EC5. En sélectionnant cette ligne, on provoque l'affichage du panneau suivant :
En plein milieu une des trois images que tycho génère à partir des 36 poses, chaque image étant le résultat de l'addition de 12 de ces images. La détection par tycho est bien faite sur la somme des 36 images, et c'est là l'avantage majeur du tracking synthétique. La technique classique qui est réalisée en prenant 3 ou 4 images espacées dans le temps ne détecte que les objets qui sont visibles sur une des images individuelles. Donc si vous posez 4 fois 2 minutes par exemple, la détection se fait sur une seule pose de 2 minutes (si l'objet n'est pas visible en 2 minutes, il n'est pas détecté). Avec le tracking synthétique, si on pose 16 images de 30 secondes, la détection se fait sur l'équivalent d'une pose de 8 minutes, détectant des objets plus faibles que sur une pose de 2 minutes. De plus comme on reste pendant 8 minutes sur le même champ, on ne passe pas de temps à déplacer le télescope entre les poses. L'autre intérêt est en ce qui concerne les astéroïdes rapides. Un astéroïde se déplaçant à 10"/min se sera déplacé de 5" pendant les 30 secondes de pose individuelle, soit 2 pixels sur les images binnées 2x2. Si on pose 2 minutes la lumière émise par l'astéroïde durant la pose a laissé une trainée de 20" sur le détecteur. Si on a 2" de taille de pixel, l'astéroïde aura laissé une trainée de 10 pixels de long, diluant ainsi l'information (ou dit autrement ne restant que 12 secondes sur le pixel en question durant les 2 minutes de pose).
Tout en haut, le label vert, qui dit high. Juste en dessous le résultat du logiciel ndigest2, que Georges a compilé à partir du source unix du programme du MPC. La valeur RMS d'un objet réel est en général bien plus faible (inférieure à 0.1) sauf que dans ce cas précis on voit que l'image de l'astéroïde est contaminé par des étoiles proches. Ensuite le chiffre suivant (99 dans ce cas) donne la probabilité que l'astéroïde soit un géocroiseur, et quelques autres paramètres (MC : Mars Crosser, JFC : Jupiter Family Comet)
En dessous on trouve une liste d'éléments orbitaux indicatifs calculés à partir de findorb. Généralement imprécis avec seulement 18 minutes d'observation, mais pour avoir une idée...
Les trois quadrants noirs sur l'image donnent plusieurs éléments, dont les plus importants sont la vitesse et l'angle de l'astéroïde (PA). Juste en dessous de l'image on a un bouton "All" qui permet de voir la somme des 36 images. Si ce bouton n'est pas activé on peut voir la somme de 12 images, et soit le bouton play est activé auquel cas on voit les trois images animées (blink) et sinon une seule des images, et on peut passer de la 1 à la 2 à la 3 en utilisant les flèches de direction du clavier. Le bouton Zoom est évident, et les deux autres boutons, mean et median permettent d'afficher une image moyenne ou une image médiane, qui elle supprimera les étoiles. On passe au candidat suivant soit en cliquant sur la ligne correspondante sur le panneau de contrôle, soit en utilisant la flèche du haut sur le clavier (idem, A permet de passer du mode total au mode 3 images, Z permet de zoomer ou dézoomer, M de passer de médian à moyenne où l'inverse).
Plus bas, on a trois positions astrométriques de l'astéroïde détecté. On peut en fait une copie dans le presse papier (clipboard copy), ce qui permet d'aller par exemple sur la page du NEO et comet checker pour voir si l'objet est connu ou pas. On peut modifier le nom de l'objet si l'on souhaite (ObsName), on peut aussi générer le message à envoyer au mpc avec l'entête correspondante.
Le coin inférieur droit permet d'extrapoler la position de l'objet après les observations.
Le coin supérieur droit voit un bouton "close", qui permet de fermer l'application, un bouton "To confirm" qui génère un fichier qui sera lu par le télescope de confirmation. Celui ci tourne avec un script de prism qui démarre le télescope en début de nuit, refroidit la caméra puis scanne un directory "toconfirm" toutes les minutes pour voir si un fichier existe. Ce fichier ne contient que les trois lignes astrométrique, et le script extrapole la position actuelle de l'objet, et fait la pose (après avoir refait le foyer, vérifier la position sur le ciel, etc...). Ces images partent sur un PCGPU qui réduit les images. A partir de là, soit on reconnaît l'objet visuellement, en s'aidant notamment de la vitesse et de l'angle. Si l'objet est faible, donc qu'il fait partie de la masse des objets à confiance faible (low confidence) et qu'on a un doute on peut appuyer sur le bouton "check" qui va tester tous les objets détectés avec le premier jeu de détection (donc les images obtenues par le télescope de confirmation et les trois images originales qui viennent du RASA) et va trouver, le cas échéant l'image de l'objet. Cette chaîne de confirmation fonctionne aujourd'hui très bien et est réellement un plus lorsque l'on a un objet à la limite de détection.
Pour l'instant, nous observons avec seulement deux télescopes (champ de 3.3°x4.4°, 120 megapixels), les autres seront mis en place lorsque j'aurai pu me rendre aux Etats Unis et revenir avec une cinquième caméra et le PC I9 avec une RTX3090 que nous avons acheté.
Les projets futurs sont donc de passer de 2 à 4 caméras, de terminer un télescope de 50cm pour faire les confirmations, et mettre en service 2 C14 hyperstar+zwo 6200. Ce qui permettra d'aller un peu plus loin en magnitude limite et de couvrir encore plus de ciel. Les deux C14 sont installés sur leur monture mais il manque les caméras et un PC avec carte graphique pour faire la détection.
Nous sélectionnons une déclinaison de départ, et le logiciel se débrouille en fonction du temps sidéral pour rester à observer entre plus ou moins 2 heures autour du méridien tout en évitant la présence de la lune. Une fois les 4 télescopes en fonctionnement, ils seront positionnés sur une matrice 2x2, avec un champ de 6.5x4.2° sur le ciel, nous pourrons décider de couvrir plus de ciel. Idem si dans le futur nous avons des PC plus puissants, nous pourrons choisir de diminuer les temps de pose et couvrir beaucoup plus de ciel. Pour l'instant nous avons un système qui fonctionne bien.
Nous numérotons maintenant les objets découverts de la façon suivante :
On utilise les chiffres de 1 à 9, puis les lettres de A à Z puis de a à z, ce qui permet de coder jusqu'à 62 en n'utilisant qu'un seul caractère. Ce protocole a un peu évolué au départ, mais maintenant il semble relativement stable.
Premier caractère : le dernier numéro de l'année, donc 1 en ce moment, on pourra a priori utiliser ce codage jusqu'en 2082 :)
Second caractère : Mois de l'année de 1 (Janvier) à C (Décembre)
Troisième caractère : Jour du mois, donc de 1 à V (31 du mois)
Quatrième caractère : Numéro de la caméra, de 1 à 5, rajouté récemment, il était non présent dans les premières détections. Le 5 correspond au télescope de confirmation
Cinquième caractère : Numéro de l'image prise dans la nuit, de 1 à 62 éventuellement (de 1 à z)
Sixième caractère : 1 ou 2 suivant que l'astéroïde a été détecté sur les images en binning1 ou binning 2.
Septième caractère : Numéro de l'objet découvert sur ce champ, jusqu'à présent nous n'avons jamais détecté plus d'un géocroiseur par champ, donc normalement ce caractère est "1". Comme nous observons très loin de l'écliptique (c'est un choix, d'aller dans le ciel du sud où personne d'autre ne scanne) nous ne trouvons que très peu d'objets mais lorsque nous trouvons un objet inconnu il est à tous les coups intéressants, soit un géocroiseur, ou un aréocroiseur (croiseur de Mars), un Hungaria, Phocea, etc... forcément une très forte inclinaison.
Actuellement sur un champ donné nous réalisons 36 poses de 30 secondes (soit 18 minutes au total) ce qui permet de détecter certains objets au delà de la magnitude 20.5. La proportion d'astéroïdes détectés évolue avec la magnitude. Sur un champ donné (calibré sur l'écliptique) nous détectons 80% des astéroïdes de magnitude 20 et seulement 20% des astéroïdes de magnitude 20.5.
Le site de San Pedro de Atacama (en fait au sud de San Pedro) est un très bon site avec un ciel bien noir et plus de 300 nuits claires par an.
Les nuits non observées à la fin Mars début Avril correspondent à la période de passage de 1 à 2 caméras, débuggage du logiciel. Egalement à la période de pleine lune.
L’image suivante donne le calendrier 2021 (en bleu les nuits observées, même partiellement) et en gris les nuits où aucune observation n’a été faite. Normalement nous n'observons pas durant la semaine de pleine lune (nous avons tenté en Janvier et Février mais le ciel est trop brillant, aucune détection utile). Les observations ont commencée en 2020 mais plutôt en mode test, maintenant le logiciel tourne tout seul et les observations ont repris le 7 Janvier 2021.
Les découvertes réalisées se trouvent sur cette page
Notre stratégie est de clairement observer dans les déclinaisons négatives où pour l'instant personne n'observe au delà de la magnitude 19. Nous optimisons la recherche d'astéroïdes vers les astéroïdes rapides. Etant à des déclinaisons très négatives nous ne trouvons quasiment aucun objet de la ceinture principale, sauf s'ils ont une très forte inclinaison.
Version du 28 Avril 2021
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